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Le Milieu du Grand Banditisme Français

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lunik-parrain

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Claude le Gros, Francis le Belge, les Gazianni, les Guérini, les Zemmour, Boualem Talata, Jacky le Mat, Tany Zampa, les Hornec, Marc Monge, Paul Mondoloni, Jo Renucci, Paulo Leca, Ahmed Otmane, Karim Reguig, Paul Carbone, François Spirito...

Pas tout le Milieu, mais de quoi en savoir un minimum sur certaines personnes qui ont écrite des pages importantes d'un livre qui n'est pas près de se refermer. Un livre fait d'amitiés et de trahisons, de guerres fratricides et d'affrontements claniques, de violence et de règlements de compte, d'armes et d'argent sale, de strass et de paillettes, de luxe et de prison, de gros voyous et de "beaux mecs", de caïds et de seconds couteaux, de parrains et de juges de paix, de plaisir et de regrets... de beaucoup de regrets...

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les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)

Les Zemour Partie 1 - Les Débuts (1945-1965)
Les Zemour Partie 2 - L'Ascension (1965-1972)
Les Zemour Partie 4 - La Fin du Clan (1976-1982)


les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)Au début des années 70 les Zemour sont au faîte de leur puissance. A Paris on les voit partout, écumant les bars, les boîtes, les cabarets, les cercles de jeux et les tripots clandestins, eux ou leurs hommes, fédérant les voyous juifs de la capitale et disposant ainsi d'un réservoir de petites mains important et surtout très utile, faisant jouer liens familiaux, amicaux ou communautaires, bien qu'en vérité le noyau central de voyous sur qui le clan peut réellement s'appuyer compte moins d'une vingtaine de personnes. Il y a là les trois frères Zemour, âgés de 33 à 40 ans, Roland Attali 33 ans accompagné de ses deux cousins, Jean-Claude la Puce 23 ans et Jojo Elbaz 24 ans, P'tit Claude le Balafré 30 ans, les deux intimes de William Jean-Pierre Lehbar 40 ans et Roland Lenoir 29 ans, le petit Roger Bacry 39 ans, Joël Arfailloux 24 ans, Robert Lévy 30 ans, Yeux de Velours Dadoun 41 ans, Albert Darmont 27 ans, Jacques Amram 31 ans... L'état-major du clan. Au Faubourg-Montmartre les Z sont les rois absolus. A Belleville et au Sentier, comme des poissons dans l'eau. Ailleurs dans Paris ils jouent les caïds, sûrs de leur force, mettant à l'amende les voyous qui se seraient "manqués" avec eux. Ils fréquentent les tables des Champs-Elysées et de l'Etoile, multiplient les coups de racket sur les établissements de Pigalle, de la Madeleine, de la rue Saint-Denis, de la Goutte-d'Or, des Halles, tiennent plusieurs flambes clandestins dans les 9e, 17e, 18e, 20e arrondissements, mettent la main sur des enseignes prestigieuse dans toute la capitale, multiplient les associations commerciales à la limite de la légalité grâce à leur impressionnant carnet d'adresse dans la communauté et en dehors, envoient des cheptels de prostitués travailler en Allemagne, montent des affaires à l'étranger... Bref l'équipe est solide et bouge bien, chacun prenant sa part du gâteau. Pourtant après la guerre du Faubourg qui a fait 5 morts et trois blessés graves, après la guerre des cercles de jeux qui a vu 6 hommes tombés et 10 être blessés, après les escarmouches israéliennes, une nouvelle menace armée se profile : celle de la banlieue sud et du « clan des Siciliens ». Un très gros morceau, celui-là.

La Scission
 
En 1972 le remuant associé des Z Roger Bacry propose aux frères de se lancer dans l'héroïne, ce juteux bizness qui a fait la fortune du banditisme français et dont on a réunit les nombreux réseaux sous l'appellation French Connection, qui connaîtra son apogée entre 1965 et 1973. Mais un différent est apparu. Si la légende veut que Bacry se soit brouillé avec les Zemour parce qu'ils ne voulaient pas "mettre les mains dans la came", la réalité serait un peu moins romantique : les Z aurait investit de grosses sommes dans l'héroïne, mais le parcours de came ayant capoté Roger Bacry se serait retrouvé avec d'importantes dettes envers les pieds noirs, sources des premières tentions. La filière qui a été montée va en effet rapidement couler, articulée autour d'André Condemine dit Petit Ded, important organisateur de réseaux installé à Bruxelles et notamment lié à la Latino Connection d'Auguste Ricord, l'un des plus importants trafiquants français de cette époque. Mais la DEA américaine est sur le coup et la plupart des membres de l'équipe sont arrêtés, dont Bensadoun qui était chargé de réceptionner la came à New-York, et 120 kilos de blanche (un trésor !) saisis à Bruxelles. Bacry, Barokhel et quelques autres échappent au coup de filet mais tiennent à leur liberté : sachant Petit Ded dans le collimateur de la justice ils craignent un coup de balance de sa part. Son corps inanimé sera retrouvé en juillet 1973 au bord de l'eau près du port de Saint-Cloud dans les Hauts-de-Seine.
 
Le premier essai s'étant soldé par un échec, un autre envoi de drogue est organisé. Mais l'équipe est visiblement doublé par Pierre Siméoni dit "Gros Pierrot", grand parieur des clubs hippiques à qui la came avait été confiée un temps et qui l'a faite disparaître dans la nature. Il est abattu dans la soirée du 11 janvier 1973 dans une rue du 15e arrondissement de six balles de calibre 38. Décidemment la drogue ne réussit pas au petit Roger Bacry qui se retrouve totalement ruiné. Il retourne alors vers les Zemour qui l'envoient paître comme un malpropre, ce qui va fortement alimenter sa ranc½ur à l'égard des frères pieds-noirs. C'est alors qu'il entre dans le sillon d'une autre grosse équipe qui monte, celle dite des Siciliens, originaire de la banlieue sud, avec qui il avait commencé à s'acoquiner lorsqu'il montait ses entreprises dans l'héroïne.


Le Clan des Siciliens
 
Nul ne sait très bien pourquoi on les a appelé ainsi. On dit que l'origine du surnom est dû à Kiki Piat, marqué par le film d'Henri Verneuil avec Jean Gabin et Alain Delon sortit en 1969, un certain nombre de membres de l'équipe ayant des origines italiennes.
 
les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)A la tête de cette bande on trouve un duo de chocs, Jean-Claude Vella dit Petites Pattes et Marcel Gauthier, nés respectivement en 1938 et 1941. Amis inséparables depuis leur adolescence, ils font leur classe à Villejuif dans la première moitié des années 60 en donnant dans le vol et sont notamment arrêtés ensemble en 1962 à la suite d'une rixe et inculpés pour port d'armes. Ils sont alors équipés avec Albert Serefian dit Le Criquet, né en 1935, spécialiste des faux documents et soupçonné d'avoir participé au célèbre casse de la caisse d'allocations familiales de Marseille en 1961 avec l'équipe de Tany Zampa, dont son frère Robert dit "Bert l'Arménien" est très proche, Jacques Piat dit Kiki, né en 1941 et premier voyou "tapé" par la brigade Antigang en 1964 sur la préparation d'un braquage, et Pierrino Rotondo, né en 1930 de parents italiens et qui n'est à l'époque pas encore l'indicateur de la police qu'il deviendra plus tard. Ensemble ils font les macs et surtout les braqueurs, formant la première bande d'importance issue de la banlieue sud, cette BS qui en connaîtra par la suite bien d'autres, notamment dans le triangle à problèmes Ivry-Vitry-Villejuif. Ils sont en ce sens tout à fait représentatifs de la nouvelle génération de voyous issue de la "zone" qui pointe alors le bout de son nez et connaîtra son embellie grâce aux attaques à main armée, venant quelque peu secoué le vieux Milieu dont ils prennent définitivement la relève dans la deuxième moitié des années 70.
 
En 1963 Gauthier et Vella sont condamnés en Suisse à trois ans pour un braquage commis à Genève avec trois autres complices, dont Paul Gardelli qui a été tué par la police pendant l'arrestation, et Kiki Piat qui a réussit à passer entre les mailles du filet. Ils retrouvent le pavé parisien en 1966, forts d'une nouvelle les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)réputation qui n'a cessé de grandir pendant leur incarcération. Ils commencent alors, vers 67-68, à protéger de très gros tenanciers d'hôtels de la capitale, notamment Fernand Bernard dit Louis d'Auteuil. Leurs rangs s'enrichissent alors des bons services de Willy de Brabander, Pierre Abramovitch dit Krouchtchev et autres Jean-Pierre Maïone-Libaude, cet ancien combattant de l'Algérie française et ex-OAS qui bien que fils de famille s'est tourné vers le gangstérisme. Bref, une équipe qui monte et dont les intérêts ne vont pas tarder à entrer en conflit avec ceux des Zemour. Le marché parisien de la protection des hôtels de passe a beau être étendu (on en compte entre deux et trois cents dans la capitale), on a face à face deux clans qui en veulent toujours plus. Et lorsque Roger Bacry entre dans le sillage de l'équipe avec Marcel le Coréen, il ne va avoir de cesse de monter la tête aux Siciliens contre ses anciens associés. La bande de la banlieue sud, à l'approche de la guerre, continue d'ailleurs de grossir. Et les nouvelles têtes ne sont pas des moindres : Daniel Abramovitch dit Le Russe ou Le Polonais, né en 1946, qui rejoint son frère dans la bande en 1973. Il est alors en liberté conditionnelle après une condamnation à vingt ans de prison alors qu'il est encore mineur suite au braquage d'une bijouterie durant laquelle il a tiré sur des policiers. Jean-Claude Leclerc dit Le Bedeau est lui né à Stains d'un père inspecteur de police et, passionné de vélo, il enchaîne titres et compétitions à l'adolescence. Ce qui ne l'empêchera pas de virer dans le banditisme malgré une religiosité à la limite du mysticisme et cette bible qu'il garde toujours avec lui - elle est en faite creusée et dissimule un 11,43 en guise de crucifix. A 23 ans il est condamné pour l'attaque d'un fourgon blindé et sympathise en prison avec Pierre Lothoz dit Nat Le Lyonnais, né en 1939, meneur d'une fratrie de la cité des Gones qui commence à faire sérieusement parler d'elle.

Lorsque le Bedeau et le Lyonnais sortent de prison ils s'équipent avec les Siciliens. Ceux-ci tentent aussi d'intégrer à la bande leurs cadets du "Gang de la Banlieue Sud", surnom donné par la police à une jeune et solide équipe de braqueurs venue du même coin, dont beaucoup sont issus de la communauté des Voyageurs, dont seul André Gau, né en 1946, accepte l'offre. On dit aussi que Titi Pelletier, futur caïd de Montreuil et de l'est parisien dont Claude Genova sera le bras droit, a un temps frayé avec l'équipe. Un peu plus tard c'est Nénesse Bennacer, né en 1944, fils d'un maraîcher algérien de Fresnes et ayant connu sa première incarcération à 18 ans, qui entre dans la bande.
 
On a dans tous les cas là un redoutable gang, une "équipe de fers" de premier choix, qui va donner bien du fil à retordre aux Zemour. Le conflit, larvé jusque-là, éclate véritablement en 1973.

 
La Guerre est déclarée
 
Cette année-là Roger Bacry aiguille les Vella-Gauthier vers un coup de racket sur l'Aquarius, l'un des plus juteux hôtels de passes de Paris, rue Greneta aux Halles. Propriété de Gaby le Chanteur - qui tien une autre maison rue Saint-Denis - l'établissement est protégé par Pierre Manley dit Manluche, lyonnais de quarante ans ex-taximan et ex-marchand forain, et Raphaël "Yeux de Velours" Dadoun, un fidèle de l'équipe Zemour depuis leurs débuts dans le Milieu. Bacry aurait, dit-on, une dent contre lui. Quoi qu'il en soit, "Yeux de Velours" n'est pas impressionné par Bacry et ses nouveaux amis et les envoie chier sans ménagement. Au contraire de son associé Manluche qu'ils arrivent à retourner, l'utilisant pour organiser le guet-apens du 12 mars 1973 : ce soir-là vers 1h du matin, dans le parking sous-terrain de son domicile du boulevard Victor Hugo à Neuilly, Raphaël Dadoun est criblé de balles par deux hommes armés d'un colt 11,43 et d'un fusil à canon scié. Ce serait "Petites Pattes" Vella, Marcel Gauthier et Marcel le Coréen qui auraient fait le coup, marquant là le début de la "guerre des hôtels" qui va ensanglanter le pavé parisien trois années durant et faire tourner bien des têtes.

La mort de Dadoun, homme respecté dans le Milieu, fait en tout cas grand bruit et ne peut restée impunie. C'est alors que son ami Jean-Louis Augé,  très grande figure du milieu lyonnais connu pour ses liens avec l'OAS et le SAC qui sera assassiné par le Gang des Lyonnais de Momon Vidal le 15 juin 73 pour une dette impayée, aurait dépêché une équipe de tueurs pour venger son ami. Il s'agit d'un trio lyonnais arrivé depuis quelques mois à Paris formé de Pépé Nesmoz, 47 ans, un "beau mec" qui a donné dans le braquage, le vol, le recel, le proxénétisme et le faux-monnayage, d'Henri Simonelli, 37 ans, un discret qui s'est fait oublier des services de police, et de Daniel Renard, 31 ans, un colosse d'un mètre 90, braqueur et imprimeur de faux doc, menant désormais tous trois l'enquête pour débusquer les assassins de Raphaël Dadoun dont Nesmoz était un ami proche, ce qui laisse penser qu'il agissait peut-être pour son propre chef et non pour Jean-Louis Augé. Mais le machiavélique Roger Bacry, qui sent le vent tourner, a plus d'un tour dans son sac et fait courir le bruit que ce sont trois hommes du clan Zemour qui ont dézingué "Yeux de Velours" : Joël Arfailloux, Jo Elbaz et Claude "le Balafré" Gragnon. Pour leur plus grand malheur, l'intox fonctionne.
 
les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)Le soir du 6 avril 1973 vers 23h le trio lyonnais repère Joël Arfailloux dans le bar de sa maîtresse, Chez Clémence rue Claude-Bernard dans le Ve où il joue au flipper avec un ami, et le fusillent sur place lui et son compère, l'un prenant dix balles de 11,43 dans le corps, l'autre deux. Les tireurs, cagoulés et armés de Colts, étaient épaulés par un troisième homme positionné à l'entrée du bar qui a fait feu sur la devanture à l'aide d'un P.38 pour couvrir leur fuite, tandis que deux autres complices les attendent dans une 204 Peugeot à bord de laquelle ils prennent le large. A peine mis au courant du flingage et des bruits qui courent Edgard Zemour fonce à Paris depuis l'Allemagne où il se cachait suite à une condamnation à deux ans pour escroquerie (il sera arrêté un peu plus tard et relâché sous conditionnel en février 74) et secoue Claude le Balafré pour lui tirer les vers du nez sur son implication supposée dans l'assassinat de Raphaël Dadoun. Il jure alors ses grands dieux que ni lui, ni Elbaz, ni feu Arfailloux ne sont pour rien au monde liés à cette affaire. Tout le monde commence alors à comprendre d'où viennent réellement les coups. Les Siciliens désormais démasqués décident de prendre les devants et tendent un piège au trio Nesmoz-Simonelli-Renard, pourtant réputé très dur à cibler, le 19 mai 1973 : grâce à la traîtrise d'Ischil Lévites dit Riton le Juif, un associé de Pierre Manluche, et de Rubio Emilio, gangster espagnol de 45 ans connu pour avoir tué un policier à Marseille en 1955, ils arrivent à attirer les Lyonnais au Gentilly, un restaurant du boulevard Kellerman, où Rubio Emilio est censé leur donner de précieuses informations autour d'un bon repas. Mais en guise de hors-d'½uvre c'est une volée de plomb qui est servit à Pépé Nesmoz, Henri Simonelli et Daniel Renard : deux hommes surgis dans l'établissement les criblent de balles à l'aide d'un revolver et de deux pistolets automatiques, ne laissant aucune chance aux trois hommes d'atteindre les armes qu'ils dissimulent à leur pied dans une anodine serviette, les laissant tout trois sans vie sur le carrelage. Le commando aurait été formé de Jean-Claude "le Bedeau" Leclerc, Jean-Claude "Petites Pattes" Vella, Marcel Gauthier, Daniel Abramovitch et Jean-Pierre Maïone-Libaude.
 
Les Zemour ne peuvent dans tous les cas pas laisser passer cet affront supplémentaire et se doivent de châtier les traîtres qui ont permis ces guet-apens. Huit jours après la fusillade du Gentilly, le 27 mai, c'est chose faite : ce matin-là à 9 heures Pierre Manluche est abattu de cinq balles de 9mm dans sa voiture au pied de son immeuble du XVe arrondissement rue Dupleix, et Riton le Juif deux heures plus tard de deux balles de Smith & Wesson en pleine tête alors qu'il étudie tranquillement le tiercé dans sa voiture, en bas de l'appartement de sa maîtresse rue Quentin Bauchart, un Rohm 38 à la ceinture. Quant au traître Rubio Emilio il part se cacher peu de temps après en Espagne (son corps inerte sera retrouvé en décembre 1977, flottant dans un sac plastique sur la mer à Benalmada). Les Zemour auraient alors fait savoir aux Siciliens qu'ils n'en voulaient qu'à la peau de Roger Bacry, en échange de laquelle ils seraient prêt à abandonner toute velléité de vendetta, malgré les huit hommes qui sont déjà tombés sur le pavé parisien en moins de trois mois. Sauf que depuis le 18 juin le Petit Roger est placé en hôpital psychiatrique, premier internement d'un longue série. Homme traqué, fui comme la peste par les siens depuis que ses machinations ont été mises à jour, le voyou vire en effet petit à petit vers la folie, ne calmant ses crises d'angoisse que dans l'alcool et le Valium.
 
C'est à cette époque également que Gilbert Zemour va prendre quelques distances avec le Milieu pour mieux entrer dans le monde des affaires, lui qui a toujours été en recherche d'honorabilité. Avec Izi Spighel, dont le frère Richard a été un fidèle des Zemour dans les années 60, il se rend acquéreur du cabaret l'Apostrophe, rue Princesse, et de l'Aventure, avenue Victor Hugo. Il s'associe également avec René Juillet, dit "le Petit Prince", une autre figure des nuits parisiennes qui possède trois établissements, et effectue quelques belles affaires immobilières ainsi que des escroqueries diverses ici et là, notamment avec l'homme d'affaires Joseph Khaïda, vieil ami de la famille. Fin '73 il part pour le Canada où il monte avec plusieurs associés la compagnie immobilière Gipala Properties à Montréal qui réalisera quelques très beaux coups jusqu'à ce que, victime de la célébrité de sa famille, il sera expulsé du Canada et ira s'installer à Miami. Sa société connaîtra encore quelques beaux jours, désormais dirigée par sa femme Liliane Drai.


La Guerre bat son plein
 
les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)Si Manluche et Riton le Juif ont payé leur traîtrise de leur vie et que Bacry est intouchable car en hôpital psychiatrique, il reste une épine dans le pied du clan Zemour : Marcel Barokhel aka le Coréen, qui a frayé un temps avec les pieds-noirs et aurait participé à l'assassinat de Raphaël Dadoun. Dernièrement Izi Spighel est venu rapporter aux intéressés que le Coréen s'était vanté dans un de ses établissements de "mettre son colt dans le cul des Zemour". Pour les frères, et surtout William (Edgard est alors à l'ombre et Gilbert au Canada) c'est l'affront de trop : le 11 octobre 1973 le Coréen est arrosé de coups de chevrotine alors qu'il gare sa voiture en bas du domicile de sa mère rue Dulong dans le XVIIe. Le colt qu'il porte a la ceinture et qu'il destinait à quelque orifice zemourien ne lui aura été d'aucune utilité, il s'écroule mort sur le tableau de bord, percé de quatre impacts.
 
C'est à ce moment-là vraisemblablement que Marcel Gauthier, l'une des têtes pensantes des Siciliens, aurait été pris d'une véritable folie meurtrière. Ne réussissant pas à localiser les Zemour ni leurs lieutenants les plus proches il va ratisser large. Le 16 octobre c'est Désiré Dahan qui en fait les frais, lui qui visiblement avait fournit les armes utilisées pour l'assassinat de Barokhel. Il est descendu à coups de 9mm, de 11,43 et de chevrotines alors qu'il quitte l'auberge de la Galette à Saint-Maurice, dans le Val-de-Marne. Vingt-sept projectiles sont retrouvés dans son corps. Le lendemain sa protégée Michelle Le Goff, prostituée de 27 ans, se suicide dans son domicile du XIXe arrondissement. Une semaine plus tard, le 23 octobre, c'est un cousin de la famille, Roger Zemmour (avec deux m), petit voyou marseillais que sa famille destinait pourtant au rabbinat, qui est tué de douze balles de 11,43 et de plusieurs coups de chevrotine chemin du Littoral à Marseille alors qu'il quitte le bar qu'il tien non loin de là. Les tireurs seraient selon la rumeur Marcel Gauthier, Jean-Claude Leclerc et Nat le Lyonnais, aiguillés par un gangster local.
 
Autant dire que la guerre fait rage lorsqu'Edgard sort de prison en liberté conditionnelle en février 74, tout le monde s'attendant à ce que les combats redoublent d'intensité. Pourtant c'est à ce moment qu'une paix aurait été conclu entre les deux camps, à l'initiative des frères Panzani. Les deux Corses, Don Jacques et Jo, la cinquantaine et qui avaient épaulé Jean-Baptiste Andréani dans sa guerre contre Marcel Francisci, font en effet office de juges de paix respectés dans le Milieu et auraient organisé la rencontre dans leur bar du Laëtitia à Pigalle, repère de bandits corses et de braqueurs lyonnais, au cours de laquelle les deux équipes auraient accepté d'enterrer la hache de guerre pour le bien de tous, avec toujours en ligne de mire la tête de Roger Bacry qui entre deux séjours en hôpital psychiatrique se terre dans des planques connues de lui seul. La trêve tiendra plusieurs mois sans que le sang ne coule de part et d'autre.
 
Entretemps le "Petit Roger" aura mis fin à ses jours. Le 12 juin 1974 au matin, après une nuit d'ivresse, de médicaments et d'angoisse passée chez sa maîtresse Josianne dans le XIIe arrondissement, il lui tire une balle dans la tête avant d'en loger une dans la sienne. Gravement blessée la jeune Josianne s'en sort pourtant miraculeusement et parvient même à appeler les secours qui lui sauveront la vie. Mais pas celle de Roger Bacry, dont les machinations auront causé le déclenchement de la guerre des gangs qui ensanglante Paris depuis plus d'un an. Sa mort ne sonne pourtant pas la fin des combats, loin de là.


Le carnage reprend, les Z perdent pied
 
les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)

Quelques semaines après le début de la "trêve", réelle ou non, conclue au Laëtitia, Jean-Claude Leclerc est partie vivre avec femme et enfants au château de Lesmoul à Ploumérin, en Bretagne, se retirant vraisemblablement du monde des voyous pour se lancer dans des projets agricoles. Il faut dire que depuis le décès de sa maîtresse dont il était follement amoureux à l'été 73 des suites d'une interruption volontaire de grossesse, l'homme n'est plus vraiment lui-même et verse dans un mysticisme inquiétant. Assez en tout cas pour qu'un rendez-vous mortel lui soit donné le 29 novembre 1974 boulevard Voltaire à Paris, où aux alentours de 13h30 il est atteint de sept balles de 11,43 et de 9mm, dont quatre à la tête, tirées  à bout portant par deux hommes surgis d'un break Simca. S'il est tentant de voir là la marque des Zemour, il se dit aussi que l'exécution de Leclerc serait le fruit de dissensions internes au sein du gang des Siciliens, dissensions qui ont déjà poussé Nat le Lyonnais à quitter la bande. Un mois auparavant c'est Jean-Claude Attali dit la Puce, redoutable porte-flingue des Z, qui aurait été blessé dans une fusillade avec ses ennemies dans un flambe de la rue de Crimée, et dans cette même période Jean-Pierre Maïone-Libaude aurait lui aussi été ciblé par des coups de feu. Bref, autant dire que les hostilités ont repris.
 
C'est dans ce contexte que survient la fusillade du Laëtitia. Le 2 janvier 1975 à 20 heures le bar de la rue Notre-Dame-de-Lorette est pris d'assaut par six hommes masqués descendus d'une estafette, armés de pistolets, de revolvers et de fusils, qui se mettent à canarder tout ce qui bouge à l'intérieur. Claude Ducros, le comptable de l'établissement, est littéralement mitraillé et tué sur le coup tandis que sa secrétaire Christiane, protégée par son cadavre, n'est que légèrement touchée ; Jo Panzani est atteint de plusieurs projectiles malgré la table qu'il a retournée pour se protéger, grièvement blessé ; Nic "le Grec" Kastrinakis, membre de l'équipe du braqueur lyonnais Jean-Baptiste Fournel dit le Maréchal, se saisit d'une arme qui lui pète dans les mains et luis arrache la moitié des doigts ; la barmaid se  couche derrière le bar et s'en sort indemne tandis qu'un autre homme, Francis Poulain, connu pour proxénétisme, saute par-dessus le comptoir pour se protéger et reçoit une balle dans les fesses tandis qu'une autre lui lèse le foie, le c½ur et le poumon. En sortant le commando se précipite vers deux voitures qui les attendent, mais alerté par le bruit le cambrioleur "historique" Edouard Voss dit le Baron, 58 ans, sort d'un bar voisin et a le malheur de voir le visage d'un des tireurs qui avait ôté sa cagoule. Il lui met une balle dans la tête. Les tueurs n'avaient en effet aucun intérêt à ce qu'un membre du Milieu ne les reconnaisse. Car le plan mis en place était absolument terrible selon ce qui se racontera par la suite : s'en prendre aux Panzani chez eux dans une attaque sans pitié pour faire porter le chapeau aux Zemour, afin de monter contre eux les frères Corses et leurs nombreux amis. Et si l'intox fonctionne un temps les frères pieds-noirs courent crier leur innocence auprès des Panzani, qui les croient sans problème.
 
Deux mois plus tard c'est un autre carnage qui a lieu, la célèbre fusillade du Thélème. Ce jour-là, le 28 février 1975, un tuyau parvient à la BRI : l'équipe des Zemour et celle de Vella-Gauthier doivent se rencontrer dans un bar du boulevard Saint-Germain, le J'ai du Bon Tabac. Les commissaires Leclerc et Broussard partent subitement planquer sur place avec dix-huit hommes en soutien. Dans l'après-midi ils voient Edgard Zemour et son cousin éloigné Edmond, restaurateur de 64 ans à La Ciotat près de Marseille, s'installer au comptoir du Thélème, juste en face du J'ai du Bon Tabac, rejoints peu après par William Zemour, Jo Elbaz et Roland les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)Attali. L'équipe de Broussard décide alors d'intervenir avec huit hommes, tandis qu'une autre emmenée par le chef de l'Antigang Marcel Leclerc interviendra au J'ai du Bon Tabac où ils pensent trouver la bande adverse - qui n'est en fait pas présente. Au Thélème c'est l'inspecteur divisionnaire Chaix qui déboule le premier avec Lobjoix et Caillot. Subitement Jo Elbaz dégaine et, croyant à un guet-apens de l'équipe ennemie, tire en direction des policiers et atteint l'inspecteur Chaix juste au-dessus du c½ur. La réplique des inspecteurs Chaix et Lobjoix est immédiate : 14 coups de feu sont tirés en direction des cinq hommes dont quatre tombent à terre. Les autres policiers entrent alors brusquement et ceinturent Roland Attali qui n'a pas été touché et se débat comme un diable, causant à l'inspecteur Guitard un traumatisme à la rate. Dans la bagarre les policiers s'en prennent également à deux avocats algériens présents dans le bar qui se  font violemment molestés car pris pour des membres de la bande, Maître Oussedik recevant un puissant coup de crosse sur la tête tandis que Maître Benachenou écopera d'un traumatisme crânien et d'une fracture au visage. Mis à part ces "victimes collatérales", à terre c'est le carnage : Jo Elbaz, 29 ans, meurt sur le coup, atteind de trois balles. William Zemour reçoit lui trois projectiles tirés à moins de dix centimètres de distance, et mourra peu après. Son frère Edgard est touché de quatre balles tirées dans le dos, dont une logée au niveau de la colonne vertébrale qui l'handicapera durement toute sa vie. Quant à Edmond Zemour, le cousin éloigné et le seul de ces hommes à ne pas être armé, il écope d'une balle dans le genoux. Bilan : deux morts et huit blessés dont deux graves, huit semaines après la fusillade du Laëtitia.
 
Ici le piège aurait été orchestré par Pierrino Rotondo, balance notoire qui avait frayé avec Vella et Gauthier au début de leur carrière, qui a donné le tuyau à la BRI. A-t-il été téléguidé par les Siciliens ou a-t-il agit pour son propre compte, son ami et associé Jacques Renaudot ayant eu maille à partir avec les pieds-noirs la veille alors qu'ils tentaient de racketter l'établissement de sa mère, le Trou des Halles. Il ne pourra en tous cas pas donner sa propre version des faits : peu après les Siciliens l'emmènent en belle dans un resto des bords de Seine tenu par un ancien voyou et le somment de s'expliquer sur ses fréquentations policières. Rotondo tente de mouiller Marcel Gauthier qui, pris d'une rage soudaine, sort son arme et lui met une balle dans la tête. Son corps aurait ensuite été découpé en morceaux et jeté dans un bain d'acide pour en faire disparaître toute trace.
 
La fusillade du Thélème sonne en tous cas le glas de la domination des Z sur le Milieu parisien. William, le chef aimé et respecté qui fédérait véritablement les différents électrons libres du clan, n'est plus. Les obsèques de celui qu'on appelait affectueusement Zaoui seront à la hauteur de l'aura dont il bénéficiait : grandiose, et il y a foule au cimetière de Bagneux pour son enterrement. Edgard, autre éminence de la famille qui en faisait trembler plus d'un, est lui immobilisé pour un long moment : on l'a hospitalisé en prison et il ne sortira qu'un an plus tard. Gilbert a quant à lui mis quelques distances avec le Milieu comme on l'a vu, et ne parvient pas à empêcher la dislocation de l'équipe après la mort de son chef. Il se brouille même avec son frère Edgard à qui il reproche de s'être laissé attirer dans le piège du Thélème. Affaiblis, les Zemour se rabattent alors sur la prostitution allemande et ses Eros Center, où ils envoient leurs protégées dans les établissements de Francfort, de Cologne et de Düsseldorf. La guerre n'est pas pour autant terminée, même si elle semble désormais se faire plus en interne que front contre front. 

 
Tout le monde perd la tête

Le 13 septembre 1975 le corps sans vie de Jean-Claude Petites Pattes Vella est découvert dans le coffre d'une voiture stationnée place de Port-de-Prince dans le XIIIe, avec deux balles dans la tête. Marcel Gauthier semblait ne plus supporter les oppositions systématiques de son ami de toujours avec qui il avait fait les 400 coups à Villejuif, à tel point qu'il aurait intimé l'ordre à Willy de Brabander, autre membre de l'équipe, d'abattre son associé s'il ne voulait pas y passer lui-même - il aurait été épaulé par Dédé Gau dans sa sombre besogne. Le 17 octobre suivant l'équipe de Gauthier décide d'enlever Izi Spighel, cet homme des nuit parisiennes associé à Gilbert Zemour dans plusieurs établissements, afin d'attirer ce dernier dans un piège mortel. Mais l'opération tourne court à cause de la présence imprévue de la femme et de la belle-s½ur d'Izi dans le deuxième sous-sol de son immeuble où il est allé chercher sa voiture. Tant pis, ils se la font "à la sicilienne" : quatre hommes tapis dans l'ombre font rageusement feu sur leur cible qui s'écroule, morte sur le coup. 
 
Suite à ce décès Gilbert Zemour et Marc Francelet, journaliste trouble associé avec Gilbert à Spighel dans l'exploitation du cabaret l'Aventure, se rencontrent et conviennent d'un arrangement quant au partage de l'établissement. Les deux hommes se lient alors d'amitié pour trois ans, et le journaliste deviendra le biais par lequel Gilbert pourra s'exprimer publiquement dans les médias, chose qu'il ne manquera plus de faire à de maints reprises (notamment pour fustiger la police dans l'affaire du Thélème). Le pied noir prend également des parts occultes dans les autres ex-établissements d'Izi Spighel, en association cette fois avec René Juillet, le "Petit Prince de la Nuit" - dont on reparlera.
 
Côté flingage les armes parlent de nouveau au mois de mars suivant. Et visent cette fois Jean-Claude Attali dit la Puce, cousin de Jo Elbaz et de Roland Attali, tous deux présents pendant la fusillade du Thélème, et considéré comme très dangereux. Du reste, tout comme un certain nombre de protagonistes dans ce conflit armé - Roger Bacry, Jean-Claude Leclerc, Marcel Gauthier - il va lui aussi glisser petit à petit vers une forme de folie qui lui vaudra un internement en hôpital psychiatrique en 1973 où on le dépeint comme un "psychopathe caractériel, impulsif et dangereux au sens criminologique, avec une réadaptation difficile". Hors de question donc pour Gauthier and Co de laisser ce vindicatif de 29 ans en vie. Le 24 mars 1976 l'affaire est réglée : après une nuit passée à jouer dans un flambe du XVIIIe arrondissement  il regagne sa voiture vers 5h du matin lorsqu'un feu nourrit s'abat sur lui. Ce ne sont pas moins de trente balles qui le tuent net, crachées par un revolver, deux automatiques et une mitraillette, dont un projectile réservé par Nénesse Bennacer, ce nouveau venu dans l'équipe, à l'orifice anale de la victime - preuve s'il en est du mépris qu'on lui accordait.

les Frères Zemour - Troisième Partie : La Guerre des Gangs (1973-1976)Six mois plus tard la guerre prend définitivement fin. Dans le Milieu la domination des Zemour n'est plus qu'un souvenir et le gâteau des hôtels de passe, bien que périclitant et moins rentable qu'auparavant, s'est réparti entre plusieurs hommes forts, anciens ou nouveaux, dont beaucoup d'ex-Siciliens. Parce que l'existence de cette bande en tant que telle n'est elle aussi plus qu'un simple souvenir. Les assassinats en interne de Leclerc, de Rotondo et de Vella, ainsi que l'absurde fusillade du Laëtitia, en ont sonné le glas. Et c'est peut-être pour éviter à son tour d'être trahit que Marcel Gauthier est partie tout un été se mettre au vert en Corse, dix semaines d'affilées, avec sa compagne et ses enfants, son frère et sa belle-s½ur, ainsi que quelques mystérieux amis. Le 17 septembre il remet enfin le pied sur le continent. Pas longtemps. A peine a-t-il quitté à bord de sa voiture le car-ferry qui l'a mené de Calvi à Nice qu'une estafette vient bloquer son véhicule. Deux hommes armés en descendent et font feu sur lui. Gauthier parvient à s'extraire de sa voiture malgré ses blessures et s'enfuit péniblement entre les véhicules stationnés sur le port, mais il est rattrapé par ses assaillants qui l'achèvent de plusieurs balles dans la tête.

C'est Nat Lothoz aka Le Lyonnais qui aurait organisé l'opération, pour venger la mort de "Petites Pattes" Vella et surtout de son ami Jean-Claude Leclerc alias Le Bedeau une fois qu'il se fut convaincu de la culpabilité de Gauthier dans ces assassinats, vraisemblablement épaulé par Nénesse Bennacer, ce voyou qui monte et qui avait déjà logé quelques balles indélicates dans les intimités de Jean-Claude la Puce. Marcel Gauthier mort, la guerre des Siciliens se termine enfin. Etalée au total sur trois ans elle aura causé la mort de près de 25 personnes, ce qui en fait l'un des conflits les plus meurtriers de toute l'histoire du Milieu français. Et permit à la nouvelle génération de mieux s'imposer une fois le ménage fait parmi les anciens.

La suite : Quatrième Partie - La Chute du Clan (1976-1984)

Légende : William Zemour (photo 1), Marcel Gauthier (photo 2), Jean-Claude Vella (photo 3), le bar Le Laëtitia (photo 6), le bar du Thélème (photo 7), le corps de Marcel Gauthier (photo 8 )
Tags : edgard zemour, william zemour, gilbert zemour, jean-claude vella, marcel gauthier, banlieue sud, clan des siciliens, pierre lothoz, Jean-Pierre Maïone-Libaude
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#Posté le samedi 19 septembre 2015 07:09

Modifié le lundi 14 mars 2016 17:51

Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)

Les Zemour Partie 1 - Les Débuts (1945-1965)
Les Zemour Partie 3 - La Guerre des Gangs (1973-1976)
Les Zemour Partie 4 - La Fin du Clan (1976-1982)


LE FAUBOURG EN DEUIL, LES Z PRENNENT LA MAIN

 
Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)Le 2 octobre 1965 Sion Atlan, le respecté juge de paix du quartier du Faubourg-Montmartre, passe sa soirée au Poussin Bleu, café-restaurant de la rue Geoffroy Marie dont il est le patron officieux, à boire du champagne et jouer aux cartes avec des amis. Aux alentours de deux heures du matin deux hommes aux visages masqués font subitement irruption dans l'établissement, l'un armé d'un pistolet automatique et l'autre d'un fusil à pompe, et crachent la mort sur Sion et les deux hommes qui sont attablés avec lui, son porte flingue Albert Harroch, oranais de 29 ans rapatrié d'Algérie, et Richard Bensadoun, taximan ayant fricoté avec l'OAS. Une quinzaine de balles sont tirés, puis une dernière, à bout touchant, est réservée à la nuque du caïd. Bilan : trois morts.
 
Très rapidement dans le faubourg Montmartre c'est la panique : on a osé tuer Sion Atlan. Mais qui ? Mystère. En sa qualité de juge de paix il était mêlé à beaucoup d'histoires ici et là, et son meurtre peut très bien être le fait de vindicatifs mécontents de l'une de ses sentences. On parle notamment de l'équipe Perret dont les trois frères sont pourtant tous en prison pour de courtes peines au moment des faits. Le tout est que sa tête décapitée, le clan Atlan commence de péricliter et ce sont leurs alliés les Zemour qui tirent leur épingle du jeu. On commence à reprendre les domaines "protégés" par Sion petit à petit, sans heurts notables. Une année passe et les Z sont en train de devenir les nouveaux boss du coin, bien que les Perret les attendent au tournant. A la fin de l'année 66 ils vont se manquer mais les Z, eux, ne les manqueront pas.
 
C'est à cette époque que l'association Perret-Atlan dans le commerce de vins et spiritueux de la Madeleine bat de l'aile, les premiers décidant de rompre le contrat, sans doute suite suite à un différent sur des affaires de racket. Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)René Atlan, très remonté, aurait alors crûment injurié la Mère Léo, la matrone du clan adverse, ce que ses fils ne pouvaient pas laisser passer. Le 21 décembre 1966 lorsque Gilbert Perret apprend que René Atlan se trouve à deux pas du bar louche de la rue de Trévises où il passe alors la soirée avec une partie de son équipe, il part tout de suite en virée avec ses hommes pour lui faire payer les mauvaises paroles lancées à sa mère. Quelques heures plus tard l'affaire est réglée : le gibier, repéré au Bon Coin rue Choron, a  été abattu de huit balles de 11,43. Cette fois-ci pas de doutes : l'offensive vient des Perret, ces "demi-juifs" peu appréciés dans le quartier, qui ont vraisemblablement été aiguillés par Lucien Sans dit Bouboule pour exécuter leur sombre besogne. Les Zemour se font alors un devoir de réparer les torts en vengeant leur ami René.
 
Un mois plus tard, le 27 janvier 1967, Gilbert et Clément Perret ainsi qu'une bonne partie de l'équipe sont réunis rue d'Abbeville au domicile de la Mère Léo à faire la fête. Ben Loulou "La Volige" est le premier à quitter ses amis. A tout jamais : il est en fait discrètement enlevé, et son corps sera retrouvé le lendemain matin percé de douze impacts sur la banquette arrière de sa voiture. Un peu plus tard dans la soirée c'est Jean-Claude Flerschinger qui prend congés du groupe et s'apprête à gagner sa voiture lorsqu'il aperçoit une DS Citroën qui attire son attention. Repérés, ses occupants lui tire dessus avant de s'enfuir en quatrième vitesse. Flerschinger s'écroule tordu de douleur, atteint d'une balle aux parties. Alertés, les Perret décident alors de décamper et partent se barricader au domicile de Clément à Fontenay-le-Fleury dans les Yvelines accompagnés de Ninan Perrier, Roger Ferrand et Séraphin Meacci, qui sur la route se font prendre en chasse et canarder par l'équipe Zemour, sans dommages. Ils sont rejoints le lendemain par Michel Laurent et Jean Fouillat pour préparer le match retour, puis le surlendemain par...la Brigade Antigang qui serre tout le monde. Direction quelques mois au trou pour ports d'armes. Quelques mois qui suffisent aux Zemour pour prendre encore un peu plus d'ampleur, et lorsque les Perret and Co sortent de prison ils comprennent que les rues de la capitale ne sont plus très sûres pour eux. Leur mère décolle pour Saint-Martin-de-Ré où son fils Marius est alors emprisonné, tandis que Gilbert et Clément partent se mettre au vert en Bretagne avant d'entrer au service du GAL (Groupe Antiterroriste de Libération), organisation clandestine espagnole chargée d'éliminer discrètement les membres de l'ETA. Le 16 août 1985 les indépendantistes basques ciblent les deux frères à Castellon de la Plan dans un guet-apens dont Clément ne sortira pas vivant. Fin des Perret. Mais reste encore pour les Zemour à s'occuper de Bouboule alias Lucien Sans, celui qui a téléguidé à distance l'assassinat de René Atlan et qui se cache alors sur la Côte d'Azur. Le 2 mai 1967 plusieurs balles de calibre 7,65 viennent se figer dans sa graisse alors qu'il se trouve dans un cabaret de Juan-Les-Pins, vraisemblablement tirées par Raphaël Dadoun épaulé par Gilbert Zemour. Il s'en sort miraculeusement mais à peine remis sur pied s'envole immédiatement pour l'Amérique du Sud où il s'activera dans le trafic d'héroïne à destination des Etats-Unis, intégrant le célèbre réseau d'Auguste Ricord (l'un des plus importants de la French Connection), tout en enchaînant les séjours en prison. Après cinq cadavres et trois blessés graves, la guerre du Faubourg est terminée.
 
Les Zemour ont désormais les coudés franches et deviennent les nouveaux patrons du Faubourg Montmartre, et lorgnent sur Belleville où Gilbert a ses habitudes. C'est à cette époque aussi que, se sentant assez forts, ils se lancent dans la protection des tenanciers d'hôtels de passe, LE secteur des très grosses équipes du Milieu. Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)La mamelle de la pègre française de l'époque c'est en effet le proxénétisme, ces demoiselles étant placées par leurs macs dans des hôtels de passe plus ou moins renommés selon la réputation de leur homme, tapinant en bas et montant faire leurs affaires dans les chambres réservées, payant à chaque montée une taxe au gérant. Au-dessus du gérant il y a le tenancier, parfois de petite envergure, d'autres fois beaucoup plus important et à la tête d'un véritable parc hôtelier. Et au-dessus de ces tenanciers on a les équipes de voyous qui les protègent contre un pourcentage des revenus faramineux du bizness, faisant de ces hommes des quasi-intouchables dans le Milieu tant les gangs qui leur sont associés sont craints par leurs pairs. Les Zemour font désormais partie de cette caste-là. Ils n'hésitent pas par ailleurs à racketter un certain nombre de commerçants de la communauté, non pas de manière systématique comme on peut le voir avec certaines organisations criminelles à l'étranger mais saisissant les opportunités à la faveur d'un service rendu, d'une dette non réglée ou d'une embrouille créée de toute pièce. En 1967 ils auraient même prélevé un impôt sur les juifs du quartier pour participer à l'effort israélien pendant la Guerre des Six jours. Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)On les voit aussi, pendant la contre-manifestation gaulliste de mai 1968, aux côtés d'André Malraux et Michel Debré assuré avec d'autres le service d'ordre des ministres. C'est aussi à cette époque qu'ils mettent la main sur plusieurs tripots clandestins, notamment Gilbert qui devient le patron d'un flambe du Boulevard Belleville lié au bar d'un certain Tahar dit Robert le Dingue et dont il a confié la direction à ses deux acolytes William Nakache et Roland Attali, tandis qu'Edgard prend possession d'un cercle officiel de bridge du Boulevard Montmartre qui se transforme la nuit en salle de jeux, officiellement exploité par sa s½ur Lucienne. William, toujours plus discret, drive lui aussi vraisemblablement plusieurs flambes de la capitale.
 
Mais, passionnés de jeux et en pleine ascension, les Zemour visent plus haut. Leur ambition nouvelle c'est de mettre un pied dans les grands cercles de jeux officiels de la capitale, domaine réservé des clans corses. Deux barons surnagent alors dans ce domaine : Jean-Baptiste Andréani et Marcel Francisci. Et dans les années 60 rien ne va plus entre les deux chefs de clan. 


FAITES VOS JEUX !
 
Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)Ces deux là ont de la bouteille et du métier. Jean-Baptiste Andréani, né en 1905 en Corse, fut propriétaire de maisons closes à Saigon, résistant sous l'Occupation, puis s'enrichit après la guerre dans le trafic d'or et de piastres en Indochine avant de partir s'installer à Paris au début des années 50 où il devient propriétaire en 1959 du Grand Cercle, rue de Presbourg près de l'Etoile, le plus huppé des clubs de jeux de la capitale dans lequel il est associé au caïd marseillais Antoine Guérini, au cousin de Paul Carbone Antoine Peretti, à l'ex-commissaire nouveau voyou Robert Blémant, au patron du club de foot le Red Star Albert Zenatti, et à Marcel Francisci, l'autre grand du jeu à Paris. Celui-là est né en 1919 à Ciamannacce. Engagé volontaire pendant la guerre, prisonnier, évadé, résistant, décoré, il nouera pendant cette période de solides amitiés gaullistes, mais aussi malfrates, notamment avec Jo Renucci. Après la guerre il donne dans le trafic de cigarettes et d'alcool à Tanger, entre dans le service d'ordre du RPF, adhère au SAC, devient conseiller général UDR de la Corse du Sud, et se lance dans les années 50, épaulé par ses quatre frères, dans le monde des jeux : il devient actionnaire du Mammelstein à Beyrouth, du River Club à Londres et du casino de Namur, contrôle les banques à tout va du casino de Nice et de Forge-les-Eaux, acquiert le Cercle Haussmann puis l'Avation Club aux Champs Elysées.
 
Quant à l'association dans le Grand Cercle entre les Andréani, Francisci, Guérini et compagnie elle ne tient pas bien longtemps, et vacille définitivement à partir de 1962, occasionnant quelques fusillades et surtout l'assassinat de Robert Blémant en 1965 qui entraînera la chute du clan Guérini à Marseille. Côté parisien la haine que Jean-Baptiste Andréani et Marcel Francisci nourrissent l'un à l'égard de l'autre laisse éclater une nouvelle guerre des jeux en 1967. En décembre de cette année deux poseurs de bombe, Roger Maracchini et Noël Renucci, meurent dans l'explosion des charges de plastique qu'ils destinaient à la villa de Francisci, lequel décide de répliquer subitement. La guerre se déplace alors à Ajaccio : en janvier 68 c'est le fidèle bras armé d'Andréani, Antoine Alfonsi dit Antunarella, qui est blessé de deux balles, puis quelques jours plus tard Dominique Nesa, un autre fidèle, échappe à un attentat. Le 21 juin, toujours à Ajaccio, le café Wagram avenue de Paris est mitraillé par six gangsters alors que se trouvent à l'intérieur trois frères Francisci qui s'en sortent tous indemnes, tandis qu'autour d'eux un homme ne se relève pas et six finissent à l'hôpital.
 
Bref la guerre bat son plein et c'est alors que les Zemour pointent le bout de leur nez. Ils vont d'abord aller proposer leur soutien en qualité d'alliés et de gardes du corps à Jean-Baptiste Andréani qui, méprisant ces gens arrogants et sans manière, les éconduit et préfère s'adjoindre l'aide des deux frères Panzani, Don Jacques et Xavier dit Jo, deux figures corses du Milieu parisien qui tiennent le Laëtitia à Pigalle. Les Zemour se rangent alors du côté de Marcel Francisci qu'ils ont rencontré par l'entremise de leur ami Joseph Khaïda, un très grand du monde des jeux qu'ils connaissent depuis l'Algérie - et dont on aura l'occasion de reparler. Un cousin, Sauveur Zemour, devient alors le garde du corps du Grand Marcel, tandis qu'Edgard et Gilbert sont vus de plus en plus souvent au Cercle Haussmann, intéressés vraisemblablement dans certains jeux de l'établissement. Jean-Baptiste Andréani préfère lui se mettre au vert et ne réapparaîtra que cinq ans plus tard à Paris, en 1973. Mais les auteurs de la fusillade du Wagram à Ajaccio qui a failli coûter la vie aux frères Francisci sont eux toujours aux premières loges, ce que Marcel ne peut supporter. C'est alors que les Zemour prennent les devants.
 
Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)Le 3 octobre 1968 aux alentours de midi, François Andreani et Toussaint Giovanelli sirotent tranquillement un verre au café La Musardière avenue Carnot, à deux pas du Grand Cercle. Une voiture se gare alors à proximité, deux hommes restent à son bord tandis que trois autres entrent dans la café armes au poing en criant "police!". Ils fouillent vaguement les consommateurs et embarquent Andréani et Giovanelli qu'ils ont au préalable délestés de leurs armes et menottés l'un à l'autre. Mais à l'approche de la voiture Andréani a un doute et commence à se débattre, c'est la bousculade et les faux policiers abattent alors sommairement sur le trottoir les deux Corses de dix balles de 11,43 dans la tête. Dans le milieu l'affaire fait grand bruit, et selon Michel Ardouin c'est à ce moment-là que la "côte d'amour" des Zemour aurait véritablement explosée. Abattre ainsi deux gangsters corses redoutés en pleine journée sur une avenue ultra fréquenté, c'est qu'on n'est pas n'importe qui. Désormais le Milieu sait à quoi s'en tenir. Pendant ce temps la vendetta continue. Le 21 octobre c'est Ange Leca, autre participant à la fusillade du Wagram à Ajaccio, qui est abattu, et le lendemain deux physionomistes du Grand Cercle, Mathieu Mareschi et Antoine Cesari, sont blessés dans une fusillade rue Richer. Pour le ministre de l'Intérieur Raymond Marcellin s'en est trop. Il lance le 25 octobre des descentes dans les cercles de jeux et les tripots clandestins, et interdit toutes les salles de jeux de France à Andréani et Francisci. A la fin de l'année suivante les deux hommes arrivent à lever l'interdiction et début 1970 ils enterrent officiellement la hache de guerre afin de pouvoir mieux veiller à la bonne marche de leurs affaires respectives. Les Zemour, eux, se font gentiment écarter des affaires de Francisci, leur alliance ayant finalement amener plus de désordre que de bien fait aux affaires du Corse. Peu importe. Après l'élimination des Perret et le double assassinat de l'avenue Carnot les frères pieds noirs se sentent invulnérables et bénéficient d'une aura sans pareil dans la pègre. Ils se mettent à déborder très largement de leurs quartiers de prédilection et deviennent rapidement les plus gros protecteurs de tenanciers d'hôtels de passe de la capitale.
 
Leur équipe s'est en effet entretemps enrichit de nombreuses nouvelles gâchettes, presque tous juifs ou pieds noirs. L'union fait la force et cette force-là personne n'a envie de s'y frotter. On trouve désormais dans Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)leurs rangs, en plus des Dadoun, Lehbar et autres Attali déjà cités, Claude Gragnon dit "P'tit Claude" né en 1940, dit aussi "le Balafré" en raison de la cicatrice qui lui barre le visage, Roland Lenoir dit Choukroune, né en 1941 et grand ami de Jean-Pierre Lehbar qui l'a fait entrer dans l'équipe, Joseph Elbaz né en 1946 et cousin de Roland Attali, lequel a également introduit un autre cousin, le jeune Jean-Claude Attali, surnommé La Puce en raison de sa petite taille et de son caractère incontrôlable, le petit Roger Bacry, un nerveux qui causera beaucoup de torts au clan, emmenant avec lui Marcel Barokhel dit Le Coréen, oranais né en 1931 qui connaîtra sa première condamnation à 15 ans pour violences sur représentant des forces de l'ordre, ancien du bataillon de Corée et gravement blessé dans un règlement de comptes en 1960, et encore quelques autres comme Robert Lévy, Albert Darmont, Joël Arfailloux, Jacques Amram ou encore Guy Attali.
 
Bref rien que du beau monde, certains étant entièrement dévoués à la cause des Zemour sous l'égide du chef William, d'autres ayant une fidélité un peu plus tangente comme on le verra. En attendant les Z sont au faîte de leur puissance, et commencent à tourner leurs ambitions vers l'étranger.

Les Frères Zemour - Deuxième Partie : L'Ascension (1965-1972)

 
AVENTURES ETRANGERES

Leur position désormais assurée à Paris et forts de la fidélité de nombreux voyous, en cette fin des années 60 les Zemour décident d'élargir un horizon hexagonal désormais trop étriqué. Et un pays qui a leur faveur c'est l'Allemagne et ses Eros Center, établissements légaux entièrement voués à la prostitution où les frères auraient vraisemblablement envoyé nombre de leurs protégées travailler, du côté de Munich, puis un peu plus tard également à Francfort, ville qui en compte alors près d'une quarantaine et où ont été vus à plusieurs reprises William et Edgard, ainsi que quelques membres de leur état-major - Roland Lenoir, Jean-Pierre Lehbar, Jo Elbaz, Albert Darmon et Guy Attali en l'occurrence. Fin 1969 Edgard prend la gérance à Londres du restaurant français Chez Victor et en profite pour monter quelques trafics avec le continent, pas toujours très discrètement : rapidement inculpé dans une affaire d'exportation de devises il est expulsé et interdit de territoire. Théodore-Dédé, l'aîné, entre tout comme ses frères au Fichier Central du Grand Banditisme en 1970. Un statut qui ne lui plaît guère et implique que tous ses déplacements soient dans la mesure du possible notifiés par les autorités, chose insupportable à cet homme attaché plus qu'aucun autre membre de la fratrie à la discrétion. Il part donc s'installer à Palma de Majorque avec ses deux femme illégitimes, Nièves Fernandez dont il a deux enfants et Yvette Falgayrac qui lui a donné une fille, et y acquiert le bar-discothèque Le Ringo, bien que toujours officiellement domicilié chez ses parents - ce qui sera le cas tout au long de son existence.

Mais la grande aventure que les Zemour tentent alors c'est celle d'Israël, la terre promise. Entre 1968 et 1970 Edgard y voyage quinze fois avant de s'installer en 1970 à Ashdod avec sa concubine Fernande et ses trois enfants. William vient le rejoindre peu après. Et la ville qui a leur faveur c'est Tel-Aviv, où domine le "gang des Yéménites", emmené par les frères Danokh, Shimson et Israël, spécialisés dans les jeux et le racket, bénéficiant de nombreuses protections. Ils ont en face deux concurrents de taille, un ancien de la bande prénommé Shem Tov Misrahi et l'équipe de Salomon Abu. C'est alors qu'ils auraient fait appel aux frères Zemour pour leur ôter ces deux épines du pied. Le 1e avril 1970 Shem Tov Misrahi est abattu de quatre balles tirées à bout portant à la sortie d'un club près de la place Allenby, tandis que Salomo Abu, étrangement abandonné par ses deux gardes du corps, est arrêté à deux pas de là par une patrouille de militaires parmi lesquels se trouve, toujours aussi étrangement, le propre fils de son ennemie Israël Danokh. Abu sera condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour ce règlement de comptes qui a tous les aspects du coup monté. Dans les cercles autorisés il se chuchote que ce seraient les Zemour qui auraient organisé le flingage, téléguidés par les Danokh. On verra d'ailleurs un peu plus tard les deux porte-flingues qui ont abandonné Salomon Abu équipés avec Edgard.

Entretemps avec son frère William ils se sont associés avec les trois frères Abitbol, Maurice, Jacques et Elie, juifs pieds-noirs du Maroc, proches du Milieu parisien, tenanciers d'un restaurant cannois et connus pour hold-up et vols. Avec les Z ils achètent un café-restaurant pace Malkhei-Israël qu'ils renomment le Vesuvio et qu'ils transforment en établissement très select. Mais les Danokh ne voient pas d'un très bon ½il cette installation qui risque de s'éterniser et, faisant jouer leurs appuis, font se multiplier les contrôles sanitaires et administratifs abusifs. Les Abitbol préfèrent alors prendre leurs distances et ouvrent de leur côté le Marakech. Edgard de son côté fait équipe avec les deux anciens associés de Salomon Abu, Georges Bismuth et Elie Meyzels, et commence de mettre la main par la force sur quelques établissements de la ville, notamment le réputé club Tiffany dont le patron Bernie Henson porte plainte pour tentative de racket.

Décidemment la présence de ces fratries françaises à Tel-Aviv n'est pas du tout du goût des Danokh. Fin '71 Jacques et Elies Abidbol sont arrêtés pour port d'armes dans ce qui a tout l'air d'un coup monté et début 72 ce sont tour à tour le Marakech, le Tiffany et le Vesuvio qui flambent. L'incendiaire présumé de ce dernier serait Ilan Ashrov, gangster notoire de 29 ans lié à la bande de Josy Laria. On parle d'une vengeance suite à une dette non honorée par les Zemour, d'un contrat liquidé pour les Abitbol qui auraient vu dans les Z les traîtres qui les auraient balancé, et enfin de la main des Danokh. Ilan Ashrov, lui, ne pourra jamais levé le voile du mystère : son corps est découvert dans les alentours d'Haïfa le 21 mars 1972, plombé de plusieurs balles de revolver. Tous les regards se tournent bien évidemment vers Edgard qui est interpellé puis expulsé d'Israël, tout comme William. Les autorités leur font bien comprendre qu'ils ne sont plus les bienvenues dans leur pays. Fin de l'aventure israélienne, retour aux affaires parisiennes. Dont ils n'ont jamais été absents en vérité, multipliant sans cesse durant ces deux années israéliennes les allers-retours avec la capitale française pour veiller à la bonne marche du bizness. 


Et celui-ci ne va pas tarder à causer de terribles combats. La tention avec les équipes ennemies, qui n'a cessé de monter tout au long de l'année 72, éclate définitivement en 1973 et va causer beaucoup de morts de part et d'autre dans une guerre impitoyable entre deux clans aux dents trop longues. C'est ce que nous verrons dans le prochain article qui va essayer de retracer le plus fidèlement possible les différentes étapes de ce conflit, qui s'étale sur trois années au total.

La suite : Troisième Partie - la Guerre des Gangs (1973-1976)


Légende : Gilbert Zemour entouré d'André Malraux et Michel Debré (photo 4), Marcel Francisci (photo 5), William Zemour (photo 7)
Tags : edgard zemour, gilbert zemour, william zemour, sion atlan, lucien sans bouboule, marcel francisci, jean-baptiste andreani, faubourg montmartre, belleville, grand cercle, cercle haussmann, Tel-Aviv
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#Posté le mercredi 02 septembre 2015 09:22

Modifié le lundi 14 mars 2016 17:54

Les Frères Zemour - Première Partie : Les Débuts (1945-1965)


Les Frères Zemour - Première Partie : Les Débuts (1945-1965)

C'est une drôle de fratrie que celle des Zemour. Issues d'une grande famille juive d'Afrique du Nord, comptant un nombre incroyable de cousins, cousines, oncles et tantes plus ou moins éloignés, ils seront cinq frères au départ de Sétif à venir fouler le pavé parisien, sa faune interlope, sa communauté pied noir, ses filles, ses flingues, sa pègre et ses embrouilles. Cinq frères au départ, un seul à l'arrivée. Les quatre autres succomberont à ce terrible virus qui fait tant de ravage chez ces messieurs les voyous : le flingage. Il faut dire que les Z n'auront pour leur part jamais hésité à distribuer leur bonne parole à coups de 11,43. Se faire une place au soleil de la voyoucratie parisienne se fait rarement en douceur, et celle que briguaient les frangins n'était pas des moindres, plus d'une rangée de dents raclant le parquet - ce en quoi la petite taille des Zemour n'avait rien à voir.
 
De Sétif au Faubourg Montmartre, du Faubourg Montmartre au Tout-Paris en passant par Munich, Londres, Francfort, Bruxelles, Dusseldorf, Palma de Majorque, Tel-Aviv, Fort-de-France, Montréal, Cayenne, Miami, il faut reconnaître que les frères ont de la ressource, donnant dans l'escroquerie, le proxénétisme, les jeux, le racket, le monde de la nuit, l'immobilier, mais ne touchant vraisemblablement jamais à la drogue (sauf peut-être Edgard à la fin de sa vie). Et laisseront dans leur sillage de nombreux cadavres, dans leurs rangs comme dans ceux de leurs ennemies, plus d'une quarantaine. En même temps, en presque trente ans de carrière malfrate ils se seront frottés tour à tour aux caïds de la communauté juive pied-noir de Paris, aux barons corses des cercles de jeux, à la pègre israélienne de Tel-Aviv, et aux redoutables gangs de la banlieue sud de Paris. Bref, une vie bien remplit et bien mal finie. Voyons donc ça de plus près, et commençons par le commencement : Sétif.

Les Frères Zemour - Première Partie : Les Débuts (1945-1965)

LE BERCEAU FAMILIAL

Les frères Zemour sont le fruit de l'amour d'un modeste couple de juifs algériens, Clairette Atlani et Raymond Zemour, qui occupe quelques fonctions à la synagogue de la ville. Leur premier enfant Roland né en 1925, suivit de Théodore dit Dédé en 1927, William dit Zaoui en 1930, Gilbert en 1935, Edgard en 1937, auxquels succèdent quatre filles : Adèle, Renée, Josette et Lucienne, nées entre 1938 et 1944. Cela fait beaucoup de bouches à nourrir pour cette famille pauvre, qui peut néanmoins compter sur la solidarité de la communauté et sur l'aide financière du père de Raymond pour s'en sortir. Une situation difficile que beaucoup d'autres Zemour, très nombreux dans cette ville, ne connaissent pas, plus fortunés que le noyau familial qui nous intéresse, ce qui aura le don d'aiguiser l'aigreur et le sentiment de revanche des cinq frères.

Très rapidement dans la cité Lévy (aujourd'hui cité Tlidjene), l'important quartier juif de Sétif, et malgré une éducation très religieuse, la fratrie se fait remarquer. "Ils étaient turbulents bien sûr, raconte l'ancien commissaire Raulin en 1985, et un peu agressifs. On dirait aujourd'hui que c'étaient des petits loubards". Dans l'étouffante bourgade qu'est Sétif les cinq frères tuent l'ennuie entre le café Chez Maklouf, tenu par un parent, et le select Café de France, rue Constantine, à jouer aux cartes et aux boules entre deux anisettes. L'école ils n'y restent pas longtemps et bricolent ici et là pour se faire quelques billets, le maire Brincat et le député René Meyer canalisant notamment leur énergie pour en faire des agents électoraux et des colleurs d'affiches efficaces. Gilbert est notamment connu pour ses coups de poings ravageurs depuis qu'il s'est lancé avec succès dans la boxe, tandis qu'Edgard fait office de tête brûlée depuis qu'un choc à la tête l'a rendu, selon sa famille, bagarreur et colérique, multipliant les bastons mémorables avec les Arabes de la ville. Côté professionnel Roland apprend le métier de mécanicien, suivit dans cette voie par Gilbert et Edgard, tandis que le futur chef de clan William devient coiffeur et que son aîné Théodore-Dédé part s'installer à Alger pour vendre des trousseaux. Du côté des filles Adèle épousera un artisan menuisier, Renée et Josette d'honnêtes employés, et Lucienne un homme qui partira rapidement vivre en Israël après leur rupture.

Les Frères Zemour - Première Partie : Les Débuts (1945-1965)Roland est le premier à partir pour Paris, en 1947, pour travailler comme mécano. Mais il va très rapidement se tourner vers la carrière plus lucrative et moins fatigante de proxénète, mais ô combien plus dangereuse : le 17 novembre 1947 il est abattu de plusieurs coups de feu rue Blondel par un concurrent mécontent. Comme un avertissement du destin envoyé à ses quatre cadets pour les avertir du funeste avenir qui les attend. Ils auront tout le temps de venger leur aîné, quelques années plus tard. En Algérie, après le massacre de Sétif en mai 1945 et la terrible répression qui s'en suit, la tension monte d'un cran jusqu'au déclenchement "officiel" de la guerre d'indépendance le 1e novembre 1954. La famille Zemour, qui a déjà vu trop de sang couler dans sa ville natale, décide elle aussi de partir pour la métropole. Théodore est le premier, en 1955, alors âgé de 28 ans, auquel succède Edgard, 19 ans, qui a trouvé un métier d'ajusteur-tourneur, suivit progressivement par toute la famille, les parents Raymond et Clairette s'installant d'abord à Saint-Denis puis dans un pavillon d'Ormesson.

Leurs fils, eux, se lancent presque immédiatement dans des activités peu recommandables. Et s'ils commencent petits, c'est qu'ils ne sont encore que des caïds en devenir. 


LE TEMPS DU BIDONNAGE

La grande spécialité des petits voyous d'origine israélite c'est alors le bidonnage, nombre de futurs grands bandits juifs faisant leur classe dans ce "modeste" bizness de petites arnaques. Les années 50 c'est en effet le temps de la relance économique, et la grande époque de la vente à domicile et des "tireurs de sonnette", la marchandise allant aux consommateurs plutôt que l'inverse, les grandes surfaces n'ayant pas encore pointé le bout de leur nez dans nos chères provinces. Pour les bidonneurs il s'agit donc de faire du porte à porte dans les coins éloignés des grands centres urbains et d'embrouiller le client potentiel en faisant passer des produits bas-de-gamme pour de la marchandise de première qualité afin de la vendre très chère, la confusion entre anciens et nouveaux francs aidant très souvent ces messieurs à mieux arnaquer leurs victimes. Derrière ces vendeurs se trouvent des entreprises qui les ravitaillent en marchandises, elles-mêmes approvisionnées par des fabricants bien souvent basés au Sentier, le célèbre quartier juif de Paris.

C'est dans cette optique que Théodore-Dédé fonde à Troyes une société dans laquelle il va faire collaborer ses frères, qui lâchent rapidement leur très courte carrière de travailleurs manuels pour embrasser celle de malfrat. Commençant dans l'arnaque aux trousseaux ils vont ensuite se lancer dans l'arnaque aux vins, plus rentable, branche dans laquelle ils feront des merveilles. Ils fréquentent à cette époque un modeste restaurant auvergnat rue de Trévise dans le IXe, Chez Baille,  où ils "lèveront" leurs premières conquêtes féminines et mettront ainsi un pied dans le monde du proxénétisme, maquant quelques filles ici et là, suiteLes Frères Zemour - Première Partie : Les Débuts (1945-1965) logique et presque obligatoire à cette époque dans une carrière de voyou digne de ce nom. Gilbert notamment aurait eu une gagneuse dans le midi et une autre à Grenoble, tandis que William protègerait une fille à Paris et une autre à Nevers. Mais le monde des maquereaux est, comme on le sait, un panier de crabes plein d'embrouilles, de jalousies et de coups fourrés. Edgard sera ainsi blessé de quatre balles de pistolet en 1961 sur les Champs-Elysées et Gilbert inquiété par la justice en 1963 pour une tentative de meurtre sur un yougoslave d'Aubagne, Simic Jacov, tandis que Théodore est arrêté armé la même année au même titre qu'Edgard en 1959 et 1960. C'est que dans ces premières années un peu timides les petites condamnations pour escroquerie, vol et proxénétisme pleuvent sur les quatre frères : entre 1955 et 1960 Gilbert est condamné deux fois, Dédé quatre, Edgard trois tandis que William passe devant huit tribunaux à travers la France. On les voit également faire les colleurs d'affiches et les agents électoraux pour les Gaullistes, aux côtés notamment du petit Roger Bacry qui deviendra un de leurs lieutenants et dont on reparlera, et fréquentent le SAC, la police d'état de Charles De Gaulle (leur avocat est Pierre Lemarchand, recruteur officieux de barbouzes anti-OAS), pour qui ils donnent quelques coups de main. Et surtout, seize ans après son assassinat ils vengent enfin leur frère aîné Roland en 1963 : cette année-là son meurtrier présumé, un certain Filippi, proxénète sexagénaire, est retrouvé mort sur la route de l'Estérel à Nice.

Bref, petit à petit les Z commencent à faire parler d'eux. Et dans le quartier qui a leurs faveurs, le Faubourg Montmartre, fief de la communauté juive pied noir de Paris, ils commencent à devenir des figures incontournables. Mais il y a déjà là des hommes bien en place. Plus pour longtemps. Et les Zemour sauront saisir avec brio les opportunités qui vont s'offrir à eux. 

Les Frères Zemour - Première Partie : Les Débuts (1945-1965)

LE FAUBOURG MONTMARTRE
 
Le rapatriement des Français d'Algérie va voir essaimer à travers toutela France de nombreux groupes de pieds-noirs, dont bon nombre de juifs qui iront se fixer à Paris, principalement dans les quartiers de Belleville et du Faubourg Montmartre où la communauté a des attaches depuis longtemps, y reconstituant l'ambiance chaleureuse et animée du pays natal. Et parmi ces inconsolables nostalgiques de l'Afrique du Nord, une frange a choisit la voyoucratie pour seconde patrie, avec comme secteurs de prédilection comme on l'a vu le bidonnage, et bien sûr le proxénétisme.
 
L'homme qui domine tout ce petit monde dans le quartier du Faubourg Montmartre, en plein coeur du IXe, c'est Sion Atlan, né en 1929, accompagné de son frère cadet René et de quelques cousins, tous originaires de Batna. Les cinq autres frères du bonhomme ont eux officiellement embrassé des carrières tout à fait honnêtes de cafetier, de boucher ou de grossiste en volailles, mais en réalité lorgnent bien souvent sur le proxénétisme et épaulent leurs aînés dans leurs activités délictueuses. Juge de paix respecté de la communauté, réglant les problèmes privés en interne en faisant jouer de son aura pour calmer les ardeurs des uns et des autres, Sion s'est fait avec son équipe une spécialité de la "protection" des commerçants du Sentier et du faubourg, tout en donnant bien évidemment dans le "pain de fesse", le classique du Milieu d'alors. L'autre redoutable fratrie du quartier c'est celle des Perret, dit les "demis-juifs". Ils sont trois, Marius, Clément et Gilbert, avec en arrière plan la force faite femme en la personne de Léonie Benaïne, dite "La Mère Léo", leur génitrice et véritable matrone du clan qui a d'ailleurs servi pendant la guerre dans l'armée américaine. Remuants et vindicatifs, les Perret se sont eux spécialisés dans la protection des fournisseurs de vins et spiritueux, fréquentant la célèbre bande des Trois Canards, tenant notamment le Bar des Cornouailles rue des Martyrs et La Romance rue Pigalle. On trouve dans leurs rangs de beaux mecs comme Ben Loulou dit La Volige, oranais proprio de l'hôtel de passe le France-Italie rue Saint-Denis, Lucien Sans dit Bouboule, un basque bagarreur qui fréquente le gratin pied-noir, corse et sudiste, spécialiste du vol de voitures connu pour plusieurs casses, pour proxénétisme et pour avoir bossé avec le SAC, mais aussi les frères Fouillat, Ninan Perrier, Michel Laurent, Roger Ferrand, Jean-Claude Flershinger et Séraphin Meacci. Pour l'instant l'équilibre des forces tien comme il peut, les frères Atlan et les frères Perret étant même associés dans l'exploitation d'un commerce d'alcools dans le quartier de la Madeleine.

Dans cette univers les Zemour se sentent comme des poissons dans l'eau. C'est à cette époque, dans la première moitié des années 60, qu'ils entrent dans le sillage des frères Atlan. Et les quatre frères partagent déjà la passion commune qui les unie : celle, dévorante, des jeux. On les voit ainsi écumer les tripots clandestins du quartier, les "flambes" comme on les appelle, ainsi que ceux de Belleville, y dilapidant des nuits durant l'argent du proxénètisme et des arnaques. Ils y fréquentent toute la faune malfrate de la capitale, se faisant connaître, nouant contacts et amitiés, nourrissant les premières inimités. C'est à cette époque que Gilbert, qui malgré une carrière de voyou bien remplit cherchera toujours à se fabriquer une façade d'honnête homme, se considérant plus comme un affairiste chassant les bons coups à la limite de la légalité que comme un gangster, achète le restaurant l'Assiette Carrée rue dela Fidélité dans le Xe, spécialisé dans la cuisine orientale et provençale, et qui deviendra le QG de l'équipe. Le véritable chef du clan c'est alors Willam aka Zaoui. La place revenait avant à son frère Théodore-Dédé, le très secret aîné des Z, mais depuis la fin de la période bidonnages en 1963 il a pris ses distances avec le Milieu, bien qu'il soit toujours là pour épauler les siens en cas de coup dur et qu'il continue d'arpenter les tapis de jeux parisiens. C'est donc au charismatique William de tenir les rennes de la fratrie, homme discret qui aura vécu toute sa vie dans une quasi-clandestinité, ne possédant absolument rien en son nom propre, ni domicile, ni automobile, ni compte en banque. Il vivra d'ailleurs une éphémère liaison avec Marie-Christine Guérini, la fille de Barthélémy Guérini, figure du célèbre clan corse qui régnait alors à Marseille. Une autre preuve des liens noués par le chef pied noir avec la cité phocéenne sont les intérêts qu'il détient dans le Pourquoi, un tripot clandestin proche du Vieux Port qu'il tient en sous-main, y associant des marseillais corses, juifs et arméniens. Le plus jeune des Zemour, Edgard, est quant à lui d'une autre trempe que son aîné, colérique et démonstratif, une tête brûlée redoutée pour ses coups de sang explosifs. C'est autour de ce noyau familial que se forme un premier cercle de fidèles : il y a là les deux frères Spighel - Richard qui est un voyou pur et dur et qui mourra d'une tumeur au cerveau à la fin des années 60, et Izi qui va rapidement se tourner vers le monde de la nuit dont il deviendra une figure importante, vivant sept années durant avec la chanteuse Annie Philippe et ami intime d'Alain Delon-, Roland Attali né en 1937 à Constantine et arrivé en France à vingt ans, passionné de bijoux, d'armes à feu et d'automobiles, Raphaël Dadoun dit "Yeux de Velours", juif marocain très "réglo" connu pour sa participation au célèbre braquage de la bijouterie Colombo à Milan en 1964, Jean-Pierre Lehbar né en 1930 et grand ami de William, officiellement gérant d'un pressing, et encore quelques autres.

En attendant, tout ce beau monde s'active tranquillement dans le monde merveilleux du proxénétisme et de ses hôtels de passe, en très bonne entente avec le clan Atlan tandis qu'avec les Perret on se regarde en chien de faïence. Mais l'équilibre se fissure en 1965, durant ce mois d'octobre qui voit Sion Atlan se faire abattre par une équipe inconnue. Les Zemour vont enfin pouvoir en profiter pour prendre leur envol après déjà dix ans de "petits métiers" dans le Milieu.  


Bientôt la deuxième partie, où l'on verra comment les Z vont s'adapter à la nouvelle donne dans le quartier et vont véritablement débuter leur ascension, se frottant par la suite aux Corses des cercles de jeux puis aux caïds de Tel-Aviv, diversifiant et internationalisant leurs activités. 

Les Zemour Partie 2 - L'Ascension (1965-1972)
Les Zemour Partie 3 - La Guerre des Gangs (1973-1976)
Les Zemour Partie 4 - La Fin du Clan (1976-1982)
Tags : zemour, edgard zemour, william zemour, gilbert zemour, sétif, faubourg montmartre, sion atlan
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#Posté le dimanche 23 août 2015 08:02

Modifié le lundi 14 mars 2016 17:52

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